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30 décembre 2021

Un ancien enfant soldat libérien se voit reconnaitre la qualité de réfugié au titre de l’exceptionnelle gravité des persécutions qu’il a subies jusqu’en 2003.

La Cour reconnait la qualité de réfugié à un ressortissant libérien dont le père a été assassiné en 1989, l’année de sa naissance, par des rebelles du mouvement armé de Charles Taylor. En 2001, les forces paramilitaires du gouvernement ont assassiné sa mère et enlevé sa sœur, tandis qu’elles l’ont arrêté, maltraité et emprisonné pendant trois jours. Espérant venger ses parents et retrouver sa sœur, il s’est alors rapproché du groupe rebelle Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie (Liberians United for Reconciliation and Democracy - LURD) en lutte contre les forces gouvernementales. Il a ensuite subi un entrainement à la lutte armée au cours duquel il a été soumis à des menaces et des mauvais traitements. Parvenu à s’échapper, à l’âge de 14 ans, il aussitôt fui pour la Guinée.

Si les craintes actuelles de M. C. en cas de retour dans son pays de nationalité ne sont pas apparues fondées au regard du long temps écoulé depuis son départ comme des changements de circonstances politiques importants survenus depuis lors, la Cour a toutefois considéré que l’enrôlement de M. C. au sein du LURD alors qu’il était âgé de 12 ans devait être regardé comme un crime de guerre constitutif de persécutions et que ces persécutions, eu égard à leur exceptionnelle gravité, pouvaient justifier le refus de l’intéressé de se réclamer, encore aujourd’hui, de la protection des actuelles autorités libériennes. Il a été notamment tenu compte de l’intensité et de la permanence des séquelles psychiques qu’il conserve encore aujourd’hui, ainsi qu’en attestent les certificats médicaux versés au dossier. Par ailleurs, la Cour a jugé que l’intéressé ne saurait être tenu pour responsable des exactions qu’il a commises en tant qu’enfant soldat, compte tenu son très jeune âge au moment des faits, de son extrême vulnérabilité résultant notamment de la disparition des membres de sa famille dans des conditions sordides et de l’emprise physique et psychologique exercée par les autres membres du groupe (CNDA 4 octobre 2021 M. C. n° 21019250 C+).

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