Accédez au site du Conseil d'État et de la Juridiction Administrative
Accueil / La CNDA / Actualités / COMMUNIQUÉ DE PRESSE
15 juin 2022

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

La Grande formation de la Cour se penche sur l’objection de conscience

Réunie en Grande formation, la Cour nationale du droit d’asile a rejeté, le 7 juin 2022, le recours déposé par un demandeur turc qui se prévalait de son objection de conscience et de son appartenance à la minorité kurde pour justifier son refus d’accomplir son service militaire.

 

A l’occasion de ce jugement, la Cour a d’abord renouvelé et complété sa définition de l’objection de conscience, en s’appuyant sur une résolution de la commission des droits de l’homme des Nations unies datant du 2 avril 1998 et sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Aux termes de sa décision, l’objection de conscience est ainsi caractérisée comme « une réelle conviction personnelle, revêtant un degré avéré de force ou d’importance, de cohérence et de sérieux pour la personne concernée de s’opposer à tout combat, motivée par un conflit grave et insurmontable entre l’obligation de service dans l’armée et sa propre conscience ou ses propres convictions sincères et profondes, notamment de nature politique, religieuse, morale ou autre ».

 

Rappelant ensuite que le droit turc ne prévoit aucune alternative au service militaire obligatoire, hormis une possibilité d’exemption moyennant le versement d’une somme d’argent, la Cour a jugé que les déclarations du requérant, imprécises, confuses et parfois changeantes, ne permettaient pas d’établir son objection de conscience, telle que précédemment définie.

 

Au regard de la documentation publique disponible, la Cour a également observé que les forces de sécurité turques, et a fortiori les conscrits, ne sont pas susceptibles de participer, de manière systématique, à des actions militaires constitutives de violations graves des droits de l’homme, du droit international humanitaire ou du droit pénal. En outre, elle a relevé que, d’après les informations communiquées par le requérant, l’autorité militaire turque envisage son affectation dans une province éloignée des zones d’affrontement entre l’armée et les combattants indépendantistes kurdes.

 

Les juges ont en outre estimé que l’intéressé ne s’expose pas, du fait de son refus de servir, à des mesures, poursuites ou sanctions discriminatoires ou disproportionnées de la part des autorités de son pays. Rarement appliquées, les peines prévues par le code pénal turc pour sanctionner l’insoumission ou la désertion, constituées essentiellement d’amendes administratives plutôt que de peines d’emprisonnement, revêtent en effet un caractère général, impersonnel et proportionné.

 

Considérant, enfin, que les conscrits turcs ne sont soumis, durant leur service, ni à des discriminations et ni à de mauvais traitements significatifs ou systématiques, et que le pays n’est pas en proie à une situation de violence aveugle résultant d’un conflit armé, la Cour a jugé que le requérant ne justifiait d’aucune crainte relevant de la protection subsidiaire.

 

 

Qu’est-ce qu’une Grande formation ?

 

Il s’agit d’une formation de jugement élargie de la Cour nationale du droit d’asile dont le rôle est de trancher des questions de droit inédites et d’assurer la cohérence de la jurisprudence.

 

 

Contacts presse : relation.presse@cnda.juradm.fr

A savoir