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30 octobre 2019

L’office du juge, en application de l’article L. 711-4 du CESEDA, permet à la Cour de mettre fin à une protection qu’elle avait elle-même accordée et que son bénéficiaire avait obtenu par fraude.

Avec cette décision, la Cour précise le cadre d’analyse fixé par la décision du Conseil d’Etat CE 28 décembre 2017 M. MOFENIA MOKWAKOLA n°404756 B, qui détermine l’office du juge de l’asile en matière de fin de la protection et en application duquel la juridiction, lorsqu’elle juge infondé le motif de fin de protection opposé par l’OFPRA, se prononce sur le droit au maintien de la qualité de réfugié en examinant si l’intéressé relève d’une autre des causes de fin de la protection visées à l’article L. 711- 4 du CESEDA.
Saisie d’un recours contre une décision de fin de protection prise par l’OFPRA en application de l’article L. 711-4, 3° du CESEDA, sur le fondement de la clause d’exclusion de l’article 1er F c) de la Convention de Genève, s’agissant d’un réfugié s’étant rendu coupable de faits de proxénétisme sur le territoire français, la Cour a dans un premier temps considéré que les agissements perpétrés par l’intéressé au sein d’une structure criminelle de faible ampleur, localisée en France, n’atteignaient pas un seuil de gravité tel dans le fonctionnement du réseau transnational auquel il appartenait, pour que puisse lui être imputée une part de responsabilité dans la commission d’agissements contraires aux buts et principes des Nations unies au sens de l’article 1er F c). La Cour a estimé que l’intéressé n’était pas davantage susceptible de relever d’une autre clause d’exclusion de l’article 1er F de la convention de Genève, les crimes graves de droit commun pour lesquels il a été condamné ayant été commis en France après y avoir été reconnu comme réfugié, ni d’un des cas de cessation prévus à l’article 1er C de la convention.
Dans un second temps, s’agissant de la mise en œuvre de la fraude prévue à l’article L. 711-4, 2° du CESEDA, la Cour a considéré que l’article L. 711-5 du CESEDA relatif à la procédure de révision pour fraude et ouverte à l’administration dans les cas où la protection a été accordée par la juridiction, ne faisait pas obstacle à ce que la Cour puisse aussi constater par elle-même, l’existence d’une telle fraude à l’occasion d’un litige portant sur un autre cas de fin de protection. En effet, la Cour ne viole pas l’autorité de ses propres décisions lorsque, à la date à laquelle elle statue sur le recours d’une personne qui conteste la décision de l’Office mettant fin à son statut de réfugié, elle se borne à vérifier, dans les conditions fixées par le Conseil d’Etat dans sa décision CE 28 décembre 2017 M. MOFENIA MOKWAKOLA n°404756 B, que cette personne possède toujours la qualité de réfugié, y compris lorsque celle-ci a été reconnue par la Cour. En l’espèce, les multiples fraudes à l’identité commises par l’intéressé, les doutes quant à la réalité de sa présence dans son pays à l’époque des persécutions alléguées et les nombreuses contradictions relevées dans sa biographie, notamment avec les constatations du juge pénal, sont de nature à établir la fraude. C’est pourquoi, en l’absence d’un autre motif fondé de crainte de persécution ou de risque d’une atteinte grave, la Cour a mis fin à la qualité de réfugié et partant, au statut de réfugié de l’intéressé (CNDA 30 août 2019 M. O. n°19020714 C+).

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