Accédez au site du Conseil d'État et de la Juridiction Administrative
30 octobre 2019

La CNDA applique la jurisprudence de la CJUE selon laquelle les dispositions de la directive 2011/95/UE transposées à l’article L. 711-6 du CESEDA, permettant révocation ou refus du statut de réfugié, n’impliquent pas que la qualité de réfugié cesse.

La CNDA a rejeté le recours formé par un réfugié russe d’origine tchétchène contre une décision par laquelle l’OFPRA a mis fin à son statut de réfugié en application de l’article L. 711-6 du CESEDA, après sa condamnation par la Cour d'appel de Colmar à dix ans d’emprisonnement avec interdiction définitive du territoire français pour menaces de crime ou de délit à l'encontre d'une personne chargée d’une mission de service public, pour acte d'intimidation envers cette même personne, pour qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte de sa mission, ainsi que pour apologie publique d’un acte de terrorisme.

La Cour a d’abord rappelé dans sa décision les termes de l’arrêt de la CJUE du 14 mai 2019 selon lesquels la circonstance qu’une personne relève de l’une des hypothèses dans lesquelles les États membres peuvent procéder à la révocation ou au refus d’octroi du statut de réfugié, visées à l’article 14, paragraphes 4 et 5, de la directive 2011/95/UE, transposées à l’article L. 711-6 du CESEDA, n’implique pas que cette personne cesse d’avoir la qualité de réfugié, en dépit de cette révocation ou de ce refus. En effet, cette personne bénéficie toujours d’un certain nombre de droits prévus par la convention de Genève, interprétés et appliqués dans le respect des droits garantis par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

La Cour a ensuite choisi d’examiner l’applicabilité de l’article L. 711-6, 2° du CESEDA à M. T., article qui prévoit que l’OFPRA peut mettre fin au statut de réfugié d’un étranger à la condition, d’une part, que la personne concernée ait été condamnée en dernier ressort en France pour un crime ou un délit puni de dix ans d’emprisonnement et, d’autre part, que sa présence constitue une menace grave pour la société. Dès lors que M. T. avait été condamné pour un délit puni de dix ans d’emprisonnement en France, la Cour a estimé que la première condition posée par le 2° de l’article L. 711-6 était remplie. Puis, reprenant sa définition de la menace grave pour la société comme étant une menace réelle, actuelle et suffisamment grave, et prenant en considération les éléments sur lesquels la condamnation pénale s’était fondée, ainsi que l’existence éventuelle de motifs d’atténuation de la responsabilité pénale de l’intéressé relevés dans sa condamnation, appréciation globale prenant aussi en compte son comportement ultérieur, la Cour a estimé qu’une succession d’éléments de fait démontrant la persistance d’une attitude menaçante, paranoïde, instable et de propos radicaux à caractère religieux était de nature à constituer une menace réelle et toujours actuelle au sens du 2° de l’article L. 711-6. (CNDA 26 juillet 2019 M. T. n° 17053942 C+)

A savoir