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18 juillet 2019

La grande formation de la CNDA a exclu du bénéfice de la protection subsidiaire une ressortissante nigériane définitivement condamnée à une peine de cinq ans d’emprisonnement assortie d’une interdiction de séjour pour des faits de proxénétisme aggravé.

Après avoir rappelé la lutte menée par l’Organisation des Nations unies (ONU) contre la traite des êtres humains, la Cour a jugé que celle-ci était susceptible de constituer un agissement contraire aux buts et principes des Nations unies lorsqu’elle est le fait de groupes criminels organisés menaçant la sécurité internationale. Toutefois, la Cour a estimé que, dans le cas d’espèce, les agissements de l’intéressée relevant d’une activité de « proxénète intermédiaire du réseau », réalisés au sein d’une petite cellule et à un faible degré de responsabilité, n’avaient pas atteint un seuil de gravité tel qu’ils puissent être qualifiés d’agissements contraires aux buts et principes des Nations unies. A cet égard, la Cour s’est appuyée notamment sur le rapport du Bureau européen d’appui en matière d’asile (EASO) d’octobre 2015, sur la traite des femmes à des fins sexuelles au Nigeria, pour distinguer le rôle des membres de petites cellules locales exerçant des responsabilités individuelles spécifiques et compartimentées de celui d’acteurs issus de réseaux d’ampleur plus importante agissant à l’échelle transnationale, voire mondiale. Selon la grande formation de la CNDA, seuls ces acteurs apparaissent susceptibles de relever du champ de l’article 1er, F, c) de la convention de Genève et de l’article L. 712-2 c) du CESEDA, au titre de la commission d’agissements contraires aux buts et principes des Nations unies.
Sur le fondement juridique de la protection subsidiaire dont l’office avait exclu la requérante par la décision contestée, la CNDA a confirmé l’exclusion de ce bénéfice en se fondant sur les constatations de fait retenues par le juge pénal selon lesquelles aucune cause exonératoire ou d’atténuation de responsabilité n’était retenue concernant l’intéressée. La Cour a en outre retenu que si la requérante a aujourd’hui purgé sa peine, cette circonstance n’est pas en elle-même de nature à atténuer sa responsabilité personnelle dans la commission du crime particulièrement grave de traite des êtres humains, devant entraîner son exclusion pour crime grave du bénéfice de la protection subsidiaire en application de l’article L. 712-2 b) du CESEDA.

Enfin, la Cour a rejeté la demande de reconnaissance de la qualité de réfugiée pour appartenance au groupe social des femmes nigérianes parvenues à s’extraire d’un réseau de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle dont se prévalait l’intéressée au motif qu’elle restait, selon elle, toujours victime de ce réseau.
(CNDA GF 25 juin 2019 Mme I. n° 18027385 R)

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