Accédez au site du Conseil d'État et de la Juridiction Administrative
6 mai 2016

Le pays de nationalité ou de résidence habituelle du demandeur d’asile ne peut être qu’un Etat et c’est à l’intérieur des frontières géographiques de l’Etat que l’on détermine les acteurs de persécutions et de protection.

Par deux décisions rendues le 3 mai 2016, la Grande formation de la cour a jugé que le pays de nationalité ou de résidence habituelle du demandeur d’asile ne peut être qu’un Etat. Cette solution qui s’imposait, dès lors que le demandeur d’asile possède un lien de nationalité avec cet Etat, vaut aussi pour l’apatride qui, par définition, réside sur le territoire d’un Etat qui refuse de le reconnaître comme son ressortissant aussi par application de sa loi de nationalité. Elle permet d’exclure de la définition du pays d’origine toutes les formes d’organisation de droit ou de fait qui ne sont pas des Etats, même si elles exercent sur un territoire un contrôle civil et militaire concurrent d’un Etat.
Partant de cette définition du pays de rattachement et, se fondant sur l’article L.713-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile issu de la loi du 29 juillet 2016, la Cour précise que c’est à l’intérieur des frontières géographiques de l’Etat que l’on détermine les acteurs de persécutions et de protection. Cette triple distinction entre pays de rattachement, acteur de persécution et de protection permet de répondre à la variété des situations rencontrées par les demandeurs d’asile au regard de leur besoin de protection. Ainsi, un Ossète du sud est un géorgien menacé par les autorités d’Ossétie du Sud sans pouvoir espérer une protection de la Géorgie, un réfugié sahraoui est un apatride résidant en Algérie qui peut être menacé par la RASD sans pouvoir se réclamer de la protection de l’Algérie.
Parmi les acteurs de persécution ou de protection prévus par l’article L. 713-2, la cour définit les organisations qui occupent une partie substantielle du territoire de l’Etat comme étant celles qui possèdent des structures institutionnelles stables leur permettant d’exercer un contrôle civil et armé, exclusif et continu sur un territoire délimité à l’intérieur duquel l’Etat n’exerce plus ni les obligations ni les prérogatives de sa souveraineté. La Cour précise qu’en présence d’une telle organisation, celle-ci ne pourra être regardée comme un acteur de protection qu’à la triple condition qu’elle offre pour le demandeur une protection accessible, effective et non temporaire (CNDA GF 3 mai 2016 M. S. n°15033525 R) et (CNDA GF 3 mai 2016 Mme M. n°12005702 R).

A savoir